Organisé par l’association socio-culturelle ALCC, la 1ère édition a remporté un vif succès, avec plus de 200 visiteurs sur la journée du 13 octobre, la présence de 24 auteurs ainsi que des démonstrations de calligraphie, d’initiation au manga, des explications sur la reliure/restauration de livre, une créatrice/artisane du papier « Les grimoires de Yavana », le carrousel du livre de Serrières-en-Chautagne et la présence des bibliothèques de Chautagne. Les deux concours catégorie « adulte » et catégorie « jeune » étaient ouverts aux habitants de Savoie, Haute-Savoie, Isère et Ain.
Les gagnants :
Rémi Beguin, de Ruffieux (73) : catégorie adulte, nom du conte : « Tigrousse et les Groses ».
Camille Bonnet-Borgis, 12 ans, de Saint Jean de Moirans (38) : grande gagnante toute catégorie confondue « Jeune », nom de l’histoire : « L’ancien moi ».
L’ancien moi
« Il était une fois… l’ancien moi. L’ancienne Julie, la timide, celle qui rendait volontiers des services sans rien attendre en retour. Celle qui ne disait pas les mots mais qui les pensait, celle qui n’exprimait pas ses émotions mais qui les écrivait. Jusqu’en 3ème, on m’avait collé cette étiquette « d’associable ».
Ca, c’était avant le déclic, la chose qui avait changé ma vie, peut-être même sauvée. Mais chaque chose en son temps. Je n’ai plus l’habitude de me replonger dans mon passé, vous allez comprendre pourquoi… L’enfer avait commencé en 5ème, l’année où j’avais perdu ma meilleure amie dans un accident de voiture. Elle s’appelait Alice, elle était très jolie. C’était la seule personne qui me comprenait réellement. Alice me répétait souvent cette même phrase :
– Si je meurs en premier, Julie, fais-moi la promesse de vivre une belle vie, de te faire plaisir, comme ça quand on se reverra là-haut tu pourras me raconter plein de choses !
C’était comme si elle connaissait son tragique destin… Après sa mort je m’étais isolée, je m’étais créé une bulle de solitude dans laquelle je m’enfermais. Voyant ma faiblesse, certaines en ont profité et elles m’ont harcelé car je n’avais plus la force de me défendre. Les moqueries ont été de plus en plus régulières, de plus en plus violentes. Ma confiance en moi diminuait de jour en jour. Mes notes étaient en chute et je ne mangeais presque plus rien. J’étais toujours seule, à l’école ou à la maison car mes parents étaient souvent absents à cause de leur travail.
Et puis il y avait cette boule qui ne voulait pas quitter mon ventre. Elle m’accompagnait partout où j’allais. Les années défilaient, puis ce jour arriva. Ce jour où tout changea. Je m’en souviendrais toute ma vie (j’avais même noté la date). Le 13 mai. Après la mort d’Alice, personne n’osait plus aborder son sujet, jusqu’à ce fameux 13 mai.
Alors que je passais aux toilettes entre deux cours je surpris une conversation entre Kaïla (une de mes harceleuses) et Marie. Je n’y prêtais pas attention jusqu’à ce que l’une d’entre elles prononça le nom de Alice. Mes yeux commençaient à se brouiller de larmes alors j’attrapai un mouchoir qui trainait dans une de mes poches. Je ne voulais plus écouter un seul mot de cette discussion mais mes oreilles en décidèrent autrement.
– Pauvre Alice, si elle savait ce que Julie fait de sa vie…
– Pauvre Julie aussi, elle fait pitié. ricana Kaïla.
La première phrase me fit un choc (la deuxième un peu moins, j’étais habituée à ce genre de réflexion).
Je me rappelais de la promesse que j’avais faite à Alice, à ma meilleure amie. J’avais si longtemps refoulé ce souvenir… Cela me faisait horriblement mal de l’avouer mais, Marie et Kaïla avaient raison.
Alice aurait sûrement eu de la peine de me voir comme ça. Je me rendais enfin compte que la vie est parfois injuste, mais, nous n’en avons qu’une alors pourquoi la gâcher en écoutant les reproches des autres ?
Pourquoi vivre dans la peur alors qu’il y a tant de belles choses à découvrir ?
Dans une vague d’adrénaline, j’ouvris la porte de la cabine où je m’étais enfermée, m’avançai vers la porte principale des toilettes du lycée où Kaïla et son amie s’étaient adossées et leur adressai mon plus beau sourire « je m’en fiche de vous ».
Après cette journée, le harcèlement avait continué encore quelques temps mais j’arrivais désormais de mieux en mieux à me concentrer sur moi et non sur leurs moqueries. J’étais même parvenue à sortir de ma bulle et à me faire des amies !
Pendant ce grand changement, j’avais pris la décision de ne plus commencer mes histoires par « il était une fois », mais par « il sera un jour »… »
Camille Bonnet-Borgis