La 28e édition des Entretiens de Belley au pays de Brillat-Savarin se déroulera vendredi 10 octobre 2014 à Belley. Ce rendez-vous convivial de grande ampleur autour du goût, de la gastronomie, des produits de terroir et plus largement de l’agroalimentaire, rassemble chaque année de nombreux amateurs et professionnels. Cette année, le programme des animations habituelles sera enrichi par une conférence grand public sur un sujet original : la consommation d’insectes en Occident (à 17 h / Cinéma l’Arlequin / Tout public). Conférence animée par Sarah et Julia Berdugo, “évangélisatrices” de la consommation d’insectes en Occident et co-fondatrices d’un projet de barre protéinées intégrant de la farine de grillon.
Qui sont-elles ?
Diplômées respectivement du Celsa en communication-marketing et de Sciences Po Strasbourg en finance, Sarah et Julia Berdugo sont passionnées de nutrition et de développement durable. Leur entente profonde s’appuie sur une communication sans tabou et sur une confiance mutuelle pour relever le défi incroyable d’accompagner les consommateurs occidentaux vers dans le changement de leur alimentation.
Bonjour Sarah et Julia Berdugo…
– Consommer des insectes, est-ce notre avenir alimentaire ? Et pourquoi ?
« L’insecte a un véritable avenir intrinsèque, par ses qualités nutritionnelles et les avantages environnementaux qu’il apporte. Relativement aux autres sources de protéines traditionnelles, il présente également des avantages comparatifs considérables.
Voici quelques atouts de la consommation d’insectes :
D’un point de vue nutritionnel, c’est une source très riche en protéine, mais aussi en fer et en Omega 3. Sa teneur en protéine et en fer dépasse ainsi celle de la viande rouge !
D’un point de vue environnemental, l’insecte a le taux de conversion le plus intéressant (nourriture nécessaire à la production d’1 kg d’aliment comestible). Son élevage induit également une faible production de déchets, notamment les gaz à effets de serre.
D’un point de vue économique, si la production d’insectes en Occident est aujourd’hui très chère, car peu ou pas industrialisée, elle est vouée, à mesure de son industrialisation, à être une source de protéine de haute qualité et très peu chère.
L’on imagine immédiatement les applications possibles dans le contexte socio – économique mondial, où 15% de la population mondiale est sous – nutrie; et où à l’inverse 1,4 milliards de personnes sont en surpoids.
– Votre projet de barres protéinées, intégrant de la farine de grillon, (concept innovant) quel en est, jusqu’à présent, l’accueil auprès du public ?
Ou en est il ? (étude de marché, conception du produit, marketing …?)
Nous sommes en train de finaliser les prototypes que nous ferons goûter très prochainement.
Concernant l’accueil du projet en lui même, il semble que nous nous adressons de plus en plus à un public déjà averti du potentiel de l’entomophagie. L’évidence succède souvent rapidement à la surprise.
Concernant l’envie de goûter des insectes, si la première réaction est souvent le recul, elle laisse place à un engouement et une réelle envie de découvrir lorsque nous abordons les deux points suivants : l’intérêt rationnel de manger des insectes (nutritionnel et écologique), et la mise en valeur de celui ci dans un produit design qui met en appétit !
– A votre avis, le public le plus difficile à convaincre sera les enfants ou les adultes ?
Concernant notre cible, le clivage enfant / adulte ne s’applique pas puisque nous visons une population très particulière : celle que nous avons baptisé les «urban setters» qui sont effectivement des adultes compris entre 18 et 40 ans, mais aussi des urbains qui prennent soin de leur corps, CSP ++ et qui ont un goût pour la modernité.
Si nous considérons l’entomophagie d’un point de vue plus général, et dépassant donc le cadre de notre projet, les enfants nous paraissent être une cible qui bien que moins contrainte par des stéréotypes alimentaires et moins craintive de goûter des nouvelles choses (qui n’a jamais mangé du sable?), elle pourrait s’avérer plus difficile à atteindre d’un point de vue strictement commercial car les achats sont souvent contrôlés et décidés par les parents adultes.
– Pourquoi les grillons, et non un autre insecte ?
Le grillon présente le meilleur rapport qualité nutritionnelle / prix.
– Pouvez-vous nous en dire plus sur la consommation occidentale d’insecte ?
Elle est aujourd’hui en développement et des projets similaires au nôtre fleurissent aux Etats-Unis, au Canada, aux Pays-Bas et en Belgique, qui sont les plus en avance. Si initialement, on associait la consommation d’insecte à Koh Lanta : un défi d’une fois, nous voyons croître des consommateurs de plus en plus désireux de voir l’insecte s’intégrer régulièrement dans leur alimentation et l’envisage comme un aliment pouvant répondre à un besoin durable.
– Où vous fournirez-vous en matière première de « farine de grillon » ?
En Europe. Les producteurs les plus avancés sont aujourd’hui aux Pays-Bas et en Espagne. Notre barre sera elle Made in France.
– Avec la farine on peut faire un tas d’autres choses, avez-vous prévus d’autres produits à développer ?
L’insecte à de nombreuses applications possibles. Ses débouchés couvrent à la fois l’alimentation humaine, animale, le cosmétique et même la pharmacologie !
Nous souhaitons faire évoluer notre offre dans le futur. Cependant il est encore trop tôt pour déterminer à quelle échéance, et de quels produits il s’agira. C’est un secteur dynamique mais neuf, et on ne peut déjà prévoir quel sera le visage de ce marché. Nous verrons en tant voulu la stratégie à adopter…
A suivre donc !
Propos recueillis par Laurie Lombard