La troupe de théâtre “La Chrysalide” n’est plus à présenter : sous la direction de Daniel Pouthier avec la collaboration d’acteurs amateurs de la région, elle met en scène dans nos villages des moments de vie souvent symboliques de ce que fut l’histoire des lieux évoqués, réels ou légendaires.
Le mois prochain, autour du 26 juin, la troupe évoquera le drame que vécut la région de Rossillon, Egieu, Ordonnaz, Innimond… celui des sorcières dites de La Ravière en 1467.
Daniel Pouthier (Pierre Micheletti ponctuant la présentation du metteur en scène de morceaux de guitare), en partenariat avec la municipalité de Rossillon et de son maire Georges Bouvier, a présenté ce futur spectacle devant une très nombreuse assistance (plus de 70 personnes).
Lecture commentée à partir de documents d’archives, témoignages, écrits de procès ou administratifs, et surtout exposé d’une vision profonde de Daniel Pouthier après un travail de plus d’un an de recherches jusqu’à Dijon de ce terrible moment de notre histoire que fut l’inquisition. Notre région fut dans ce domaine une zone expérimentale, suivant les propos du metteur en scène.
Le spectacle en juin se déroulera sur les lieux mêmes du crime.
De quel crime ?
Celui d’une société vis à vis de ces martyrs cités précédemment : Claudie, Perronnette, Pierre, Alix, Françoise… Six femmes et un homme brûlés à côté de l’église de Rossillon le 2 octobre 1467 à 14h après avoir subi d’horribles tortures.
Pour la plupart, femmes pauvres vivant souvent de mendicité, sans protection, dénoncées par la peur des villageois afin de fournir des victimes expiatoires à la misère des consciences de ces temps obscurs.
Bien plus de 10000o personnes furent ainsi mises à mort à travers l’Europe dont 80% de femmes).
Il est illusoire de vouloir tout expliquer par le contexte social et économique, comme on ne peut réduire la montée d’Hitler en Allemagne par le seul poids de l’économie d’alors. Mais si l’on regarde bien l’environnement politique de Rossillon de ce temps, on découvre le rôle de cette châtellenie plus important que celui de la future capitale du Bugey : Belley.
Rossillon était alors chargée entre-autres des questions de justice.
Que l’on imagine ces petits villages sous la coupe des ducs de Savoie, en ce temps de Louis 1 de Savoie, au pouvoir moribond, frontaliers du Dauphiné, donc du royaume de France en pleine expansion…
On s’imagine bien qu’il fallait que ces villages ne soient pas tentés par cette riche proximité et l’inquisition (la deuxième vague) fut un moyen parmi d’autres de domination de leurs habitants par la peur. C’est pourquoi Daniel Pouthier peut affirmer que cette région fut expérimentale par rapport à la deuxième vague de l’inquisition qui allait déferler sur l’Europe.
A signaler le roman historique d’Eugène Dubois, publié en 1929, dont l’action se déroule dans la région et Rossillon même :
“Claudie, les sorciers de la Ravière”, aujourd’hui aux éditions Robert Ferrari.
Un récit certes romancé, mais dont on ressort meurtri, sali presque, tant il met en question ce que l’humanité est capable d’accomplir, aujourd’hui encore !
N’est-ce pas ?
M. B.