Contre ma fenêtre, un rouge-gorge est venu se cogner et tomber sans connaissance. Alors, je l’ai pris dans mes mains unies et j’ai prié je ne sais qui d’invisible mais de bien présent pour que le bel oiseau retrouve ses esprits. Car les oiseaux, comme toute chose sur cette terre, ont un esprit tout aussi précieux que le nôtre, en fait, bien plus vrai que le nôtre. En sortant de son engourdissement, il m’a transmis des idées par télépathie (Oh, le vilain mot que les hommes ont inventé pour plaquer leur ignorance sur le naturel de la vie) !
« Sois le héros de la plus belle aventure qui soit ! Tu trouveras toujours un oiseau comme moi transi au sol à réchauffer et à relancer vers les feuillages ! Je vais te dire un grand secret, en ce premier de l’an. Le rouge pour les alchimistes, c’est la dernière couleur avant l’obtention de la pierre philosophale aux mille pouvoirs. Tu vois, je porte sur ma poitrine ce rouge magique que je promène d’arbre en arbre, de toit en toit, de cœur en cœur… Je n’ai l’air de rien, on écoute mes trilles, on s’émerveille de ma beauté et je sème par là-même l’espérance en chacun de vous. L’homme est bien plus grand qu’il ne le croit, mais il l’a oublié. Vois, comme cette année qui s’achève l’a laissé démuni ! En fait, il est plus fort que ses tourments. Toi qui m’a sauvé, je passe dans ton cœur cette confiance en la vie pour que tu ne cesses de la répandre. »
Le bel oiseau à la rouge gorge (j’allais dire rouge comme neige, mais après tout sait-on jamais) s’est envolé au loin. Et me voilà assigné pour ma plus grande joie à ne chanter comme lui que la foi en la grandeur de l’Homme. Tout autre discours me serait désormais trahison et bassesse, surtout en ce début d’année.