Jean Anthelme Brillat-Savarin, notre gloire locale, naît le 1er avril 1755 à Belley. Il est le fils de Marc Anthelme Brillat-Savarin, seigneur de Pugieu, procureur du roi au bailliage de Belley, avocat au Parlement, et de Claudine Aurore Récamier, surnommée « la Belle Aurore ».
Il aura deux frères et cinq soeurs.
Laissons de côté son père aux multiples mérites pour porter nos regards sur Aurore, sa mère dont l’être reflète ce qui nous semble aujourd’hui des incompatibilités. A l’époque, par contre, il s’agissait là d’un portrait de femme hautement appréciée digne des plus beaux éloges.
La femme charmante
Son surnom en dit long sur ses charmes que l’on vante multiples. Visage arrondi, sourcils dessinés rectilignes, petite bouche et nez délicieusement frondeur… Et bien sûr, une taille façonnée sur mesure…
Comme toutes les femmes de qualité en ce temps-là, elle était excellente cuisinière et c’était merveille de voir ses doigts si fins pétrir l’ébauche de ce qui deviendra plus tard le fameux pâté « Oreiller de la belle Aurore » qu’avec amour son fils lui dédicacera.
La femme intraitable
Elle régnait en maîtresse absolue dans sa demeure, surtout dans sa cuisine où nul n’avait le droit de pénétrer sans sa permission. Bon, passe encore ses exigences ménagères : abordons à présent ses principes d’éducation que supportèrent avec gratitude ses enfants dont notre illustre Jean-Anthelme…
Un jour, Grande Rue à Belley, notre héros âgé de 20 ans et déjà officiant au tribunal de la ville, eut l’outrecuidance de contredire Aurore, sa mère. Elle lui adressa une claque magistrale accompagnée de ces mots : « Sachez, Monsieur, que tout démenti donnée à une mère doit recevoir un châtiment ».
Le petit gamin de 20 ans, diplômé, en garda un profond respect pour cette éducation qu’il reçut. Même l’aînée de ses soeurs, le jour de son mariage, alors qu’elle interprétait peut-être avec trop de fougue une chanson « guillerette » suscitant le sourire complaisant d’un évêque présent reçut une gifle démontrant qu’on ne badine pas avec la vertu !
Voilà, en quelques mots dressés le portrait de dame Aurore, femme charmante certes, mais intraitable sur certaines valeurs. Nous pouvons en sourire : les temps ont bien changé, n’est-ce pas ?
Michel Bigoni