Je chante les louanges de ce fromage unique
Des tables du Bugey, ornement authentique
Dont le nom ne sera qu’à la fin de ces vers
Révélé au lecteur pour sa surprise entière.
Son obscure origine échappe aux historiens :
Samuel Guichenon n’en dit strictement rien.
Monsieur l’abbé Gacon, le professeur Trenard,
Dans leurs savants ouvrages ne sont pas plus bavards.
Curieuse de mille choses, la revue le Bugey
Ignore apparemment ce modeste sujet.
Certains disent que son nom, bien qu’on n’en sache rien
Proviendrait semble-t-il de l’autre côté du Rhin.
Et d’autres plus savants affirment avec prudence
Que du pays batave serait sa provenance.
Sous forme d’une tome, il se présente à nous
D’une petite taille, dure comme un caillou
De telle sorte qu’il faut pour pouvoir la manger
La plonger dans de l’eau suffisamment chauffée,
Au bout d’une fourchette mettre un petit morceau
De pain et le tremper dans la poêle aussitôt,
Et absorber le tout avec beaucoup d’entrain.
Cela ressemble assez, à mon avis du moins
A l’aimable fondue de nos chers voisins
Lesquels cependant, puisant dans leurs tonneaux
Ajoutent à leur fromage du vin au lieu de l’eau.
Aux dires des anciens, le nôtre fut naguère
Fabriqué dans plusieurs hameaux de Saint Rambert
Grattoux, Angrieres Javornoz Morgelas.
Désormais c’est sur la commune d’Arandas
Qu’il a trouvé enfin sa retraite dernière
Où dans la discrétion il poursuit sa carrière.
Méconnu en dehors des frontières de l’Ain
Ce rustique fromage a pour nom ramequin.
P.M.